Le dispositif mis en place en juillet 2017 n’a jamais trouvé son public. Il aurait pu aider près de 9.000 demandeurs d’emploi. En un an et demi, seuls 109 contrats ont été conclus.
En Wallonie, le contrat d’insertion offert aux jeunes demandeurs d’emploi disparait. Mercredi 30 janvier, le parlement wallon a approuvé un décret qui abroge purement et simplement ce dispositif mis en place le 1er juillet 2017 par le gouvernement PS-CDH. La mesure « Impulsion-Insertion » s’inscrivait dans une vaste réforme des aides à l’emploi, mais aussi dans une perspective voulue par l’Union européenne et visant à offrir un emploi ou une formation à tout jeune chômeur, la fameuse « garantie jeunesse ». Le dispositif wallon prévoyait une intervention financière de 700 euros par mois, le contrat de travail était obligatoirement de douze mois et l’aide n’était pas renouvelable.
En juillet 2017, le public potentiellement concerné par ce contrat d’insertion avait été estimé à 9.881 personnes sur tout le territoire wallon. La dernière évaluation du dispositif date du 31 décembre 2018 : en un peu plus d’un an et demi, seuls 109 contrats ont été conclus, soit 1 % de l’estimation initiale. Chaque mois, 500 jeunes ont été convoqués par le Forem qui leur a présenté les avantages du dispositif. Mais, faute de proposition d’emploi, l’aide n’a jamais décollé. La mesure péchait par les exigences imposées à l’employeur (douze mois de contrat de travail offerts à des jeunes demandeurs d’emploi de longue durée et sans aucune expérience professionnelle) et un soutien mensuel largement insuffisant de 700 euros par mois. Pierre-Yves Jeholet (MR), le ministre de l’Emploi, a donc rapidement décidé d’en rester là, et d’abroger la mesure. Celle-ci souffrait de la comparaison avec d’autres aides du catalogue « Impulsion », comme celles visant les demandeurs d’emploi de moins de 25 ans dans leur ensemble ou ceux qui sont inoccupés depuis plus d’un an. Entre juillet 2017 et juin 2018, plus de 1.250 personnes ont ainsi bénéficié de ces dernières formules alors qu’elles auraient pu aussi relever du contrat d’insertion.
Le constat d’échec est unanime dans les rangs politiques, mais aussi au Forem et du côté des partenaires sociaux où l’on regrette toutefois l’absence d’une proposition alternative de la part du gouvernement en faveur d’un public très difficile : les demandeurs d’emploi de moins de 25 ans, inoccupés depuis au moins 18 mois et sans aucune expérience professionnelle. Au parlement wallon, la députée socialiste, Mme Istaz-Slangen, n’a pas épargné le ministre : « On l’a vu dans le cadre de la réforme APE, la concertation sociale, ce n’est pas votre fort, et bien ce dossier, il est un nouvel exemple de cet élément. Nous reconnaissons, bien entendu, que la mesure n’a pas atteint les effets attendus, n’a pas atteint les objectifs espérés, et, peut-être – même sans doute – était-elle perfectible. Mais, nous sommes étonnés des résultats de cette mesure, car une mesure similaire a été mise en place à Bruxelles, et à Bruxelles, les résultats sont bien meilleurs. Qu’est-ce qui explique, à votre avis, une telle différence ? ». Elle relève qu’un budget initial prévu de 83 millions d’euros consacré à l’emploi de personnes les plus précarisées a disparu et demandera en vain au ministre où il a disparu. Le ministre n’a pas apprécié ; comme à son habitude dans ce genre de situation, il y a été de propos provocants et sans contenu, ce qui a valu des échanges que la postérité ne retiendra sans doute pas pour leur haute qualité…
La disparition des contrats d’insertion s’inscrit dans le redéploiement annoncé par le MR et son ministre Jeholet des moyens alloués aux aides à l’emploi. En effet, sans parler de la très controversée réforme des APE, d’autres dispositifs comme le Plan Formation Insertion (PFI) ou encore les Agences Locales pour l’Emploi (ALE) devraient eux aussi subir un lifting dans les prochains mois, tandis qu’une mesure comme SESAM est déjà réformée. On relèvera au passage, un double glissement des moyens d’une part du non-marchand vers le marchand, d’autre part des personnes éloignées de l’emploi vers celles qui le sont moins…