Trends Tendances et Le Soir du 17 mai mettent en évidence une étude de Philippe Ledent, chief economist de la banque ING. Il y interroge le lien entre voter et travailler. Là où le non emploi est important, la participation électorale faiblit…
Ce constat ne peut qu’interpeller nos affiliés et soutenir ceux qui prônent des actions pour la promotion de la citoyenneté et l’émancipation sociale de nos publics.
En octobre dernier, un résident en âge de voter sur cinq a choisi de ne pas se rendre dans l’isoloir ou d’y déposer un bulletin de vote non valable. Cette moyenne dissimule d’importantes disparités, entre Messine (3,20 %) en Flandre-Orientale, et Charleroi (26,39 %). Une carte dite du « désespoir électoral » a été réalisée par Philippe Ledent, chief economist de la banque ING. Elle révèle une relation forte entre le taux de chômage et le taux de participation au marché du travail (soit le rapport entre la population active et la population en âge de travailler).
L’économiste constate les similitudes entre la carte du taux d’emploi et celle du taux de votes valables par commune. Quand le taux de chômage est élevé, le taux de participation électorale est faible. Le coefficient de corrélation entre le taux d’emploi et le taux de votes valables est de 0,77, sur une échelle allant de -1 à 1 : 77 % des variations en matière de votes blancs sont en relation avec les variations en matière de taux d’emploi.
Plusieurs explications sont avancées par le chercheur face à cette corrélation. La première est celle d’un lien direct entre les deux variables, avec une influence de la situation économique des individus sur leur comportement électoral. L’autre hypothèse est celle d’un « détachement de la société », lui-même causé par d’autres facteurs comme le niveau de qualification, qui joue un rôle important sur le marché de l’emploi ou comme le niveau social. Le taux de participation électoral pourrait aussi être le résultat du degré d’inclusion des individus : « plus les électeurs tireraient des « gratifications » de leur implication dans la société (via la scolarité, l’emploi, le niveau socio-économique, la vie associative et culturelle, etc.), plus ils seraient enclins à participer à la désignation des personnes chargées de fixer le jeu social ».
Pascal LORENT y va de quelques commentaires dans Le Soir :
- « La prudence est de rigueur : une corrélation n’est pas une causalité ».
- « ce lien entre faible taux d’emploi et désengagement démocratique remonte régulièrement des enquêtes et témoignages dits « de terrain ». Et ce constat est inquiétant à plus d’un titre. D’abord parce que cela montre que ceux qui ont le plus besoin d’une expression politique choisissent le silence des urnes. Soit pour crier leur découragement, soit pour faire payer à la classe politique ce sentiment d’avoir été oubliés ».
- « on doit alors constater l’émergence d’une forme de suffrage auto-censitaire : privés d’une situation professionnelle ou d’un accès au marché du travail, des électeurs renoncent d’eux-mêmes à exprimer un vote en faveur d’un parti et abandonnent leur voix à une répartition aléatoire ou à une urne devenue poubelle de leurs espoirs d’inclusion sociale.
- « La situation de l’Italie, notamment, démontre que le pire n’est jamais à exclure quand le désespoir gangrène une part croissante du corps social ».
A quelques jours d’une élection générale, ce constat ne peut qu’interpeller nos affiliés et soutenir ceux qui prônent des actions pour la promotion de la citoyenneté et l’émancipation sociale de nos publics. Plus que jamais, il nous faut rappeler que nos missions ne se limitent pas à la formation et l’emploi de nos publics. Education permanente, citoyenneté, émancipation, intégration et inclusion, bien-être sont autant de mots clés qui éclairent des actions à promouvoir face aux attaques de ceux et celles qui voudraient nous limiter à un simple rôle de normalisation des exclus.