Le constat est inquiétant : 49% des Wallons entre 16 et 74 ans sont en vulnérabilité numérique. Cette situation s’aggrave depuis que la crise du Covid-19 est passée par là. La numérisation à marche forcée de la société laisse de côté les personnes à faibles revenus et peu diplômées. Dans son dernier Baromètre de l’inclusion numérique, la fondation Roi Baudouin estime la situation préoccupante et appelle à des solutions alternatives.
La vulnérabilité numérique n’est pas la même pour tous, c’est une évidence. Les personnes avec un faible taux de diplôme ou des faibles revenus sont plus à risque d’exclusion numérique. C’est en Wallonie que le niveau de vulnérabilité numérique est le plus élevé avec 49% des Wallons qui possèdent des compétences faibles dans le numérique ou qui ne sont tout simplement pas utilisateurs. Les évolutions sont marquantes par rapport à 2019 : les personnes avec de faibles compétences numériques sont en augmentation. En effet, en 2021, près d’un Belge sur deux était en situation de vulnérabilité numérique (46 % des 16-74 ans, soit 3,5 millions de personnes), or ils n’étaient « que » un sur trois en 2019.
92% des ménages disposent d’une connexion internet à domicile. Mais le baromètre constate un écart entre les familles avec des hauts revenus (98% ont une connexion) et les familles à faibles revenus (82% ont une connexion). Depuis 2019, l’écart s’est légèrement réduit de 3%.
Le smartphone s’est hissé à la première place des terminaux d’accès à internet les plus utilisés. Pas moins de 90 % des Belges en possèdent un, y compris les personnes avec des faibles revenus (89 %). Mais près d’un internaute sur cinq ne dispose que d’un smartphone. Ils n’ont pas accès à des outils informatiques plus sophistiqués permettant, par exemple, de créer un CV ou d’effectuer des démarches administratives en ligne.
68% des internautes possèdent désormais un ordinateur portable, soit une augmentation de 15% par rapport à 2019. Mais ce sont surtout les utilisateurs les plus aisés financièrement (+15% depuis 2019) qui ont acquis des ordinateurs portables pendant la crise sanitaire, contre une hausse de 4% seulement chez les ménages à faibles revenus.
L’utilisation d’internet et l’accès à un ordinateur portable sont plus élevés en Flandre (respectivement 94% et 71%) et à Bruxelles (93% et 70%) qu’en Wallonie (90% et 63%).
Le stéréotype, selon lequel les jeunes de 16 à 24 ans sont mieux familiarisés avec le numérique ne s’applique pas aux jeunes peu diplômés : 22% d’entre eux se connectent à internet uniquement via leur smartphone et 45% ont des faibles compétences numériques, contre respectivement 2% et 22% pour les jeunes ayant un diplôme de l’enseignement supérieur.
La digitalisation de notre société est un phénomène durable, au-delà de la pandémie de Covid-19. Malgré les initiatives prises ces deux dernières années pour améliorer l’accès à l’internet et promouvoir la culture numérique, notre société n’a pas suffisamment réussi à faire participer les plus vulnérables à la vie numérique. On observe une hausse des exigences numériques sans une hausse proportionnée des compétences nécessaires. Une mise à jour constante de ces dernières s’impose. Or elles peinent à évoluer. On assiste donc à une baisse générale de ces compétences, une fragilisation et une hausse des populations en situation de vulnérabilité. Trois types de publics sont particulièrement visés : les jeunes, génération connectée essentiellement via smartphone, les seniors, éloignés des services en ligne, et les chercheurs d’emploi, dont les démarches sont fortement conditionnées à la maîtrise de compétences numériques que leur situation socio-économique ne permet pas de développer.
Il est donc essentiel selon la Fondation Roi Baudouin de continuer à investir dans des outils et services accessibles à toutes et à tous et dans le développement ou le perfectionnement de compétences numériques. Mais il faut aussi conserver des services non digitaux de qualité (contacts physiques, téléphone…) pour les personnes les plus vulnérables. A ce propos, Le Soir des 3 et 4 septembre cite Périne Brotcorne, chercheuse à l’UCLouvain, qui questionne le tout au numérique : « Nous devons aussi mener une réflexion sur la nécessité de poursuivre un mouvement de numérisation aussi avancé. Est-il vraiment intéressant de numériser tous les services ? » interroge la chercheuse…
Retrouvez l’étude complète ou son résumé sur https://www.kbs-frb.be/fr/malgre-la-numerisation-croissante-pres-dun-belge-sur-deux-en-situation-de-vulnerabilite-numerique